La gestion algorithmique: Quels enjeux pour les salariés et pour les organisations?
Le 29 avril 2022 s’est tenu le webinaire «La gestion algorithmique: Quels enjeux pour les salariés et pour les organisations?» auquel 78 participants se sont joints. Réunis autour de la table, 4 panélistes s’intéressant tous, sous différents angles, aux impacts de la gestion algorithmique (GA). L’animateur, Xavier Parent-Rocheleau, souligne d’entrée de jeu qu’il est essentiel de se pencher sur les effets de la GA puisque cette dernière prend de plus en plus de place au sein des milieux organisationnels, engendrant souvent une intensification du travail et exacerbant moult enjeux tels que ceux relatifs à la justice, à l’autonomie, ainsi qu’à la précarisation du travail. Suite à une brève mise en bouche au sujet de la GA, Pamela Lirio, Antoine Bujold, Benjamin Semujanga et Michel Cossette nous ont tour à tour présenté les fruits de leurs travaux de recherche.
Dans l’ensemble, les travaux de ces chercheurs et chercheurses se rejoignent vis-à-vis de l’importance de la transparence des systèmes en vue de faciliter leur acceptation par les personnes salariées. M. Bujold et M. Semujanga soulignent notamment l’importance du rôle joué par la transparence vis-à-vis la perception de justice procédurale et de justice distributive. M. Semujanga nuance toutefois le rôle joué par la transparence des systèmes en soulignant que celle-ci ne diminue pas le stress vécu par les employées et employés soumis à la rémunération algorithmique. Les travaux de Mme Lirio permettent pour leur part de démontrer que des systèmes de GA perçus comme transparents, exacts et fiables donnent lieu à des résultantes plus favorables. Elle souligne également l’importance de garder l’humain au cœur des technologies afin de favoriser l’adhésion.
Il ne faut néanmoins jamais perdre de vue qu’un système de GA n’agit pas de manière autonome. En effet, il est dépendant des pratiques de l’organisation qui y a recourt. À cet effet, M. Cossette note que le degré de transformation opéré dans la définition des professions de gestion des ressources humaines (GRH) peut avoir un impact sur le rôle joué par les systèmes s’appuyant sur l’IA dans le niveau d’efficience et d’efficacité des processus. Plus particulièrement, ce chercheur s’intéresse à l’utilisation de l’IA dans les fonctions de dotation et de gestion disciplinaire. Il souligne qu’un passage de la GRH transactionnelle vers la GRH stratégique s’impose si les organisations souhaitent maximiser les retombées positives de l’IA. Ce constat est par ailleurs corroboré par Mme Lirio qui souligne que le contexte organisationnel se doit d’être considéré dans l’analyse des impacts de la GA. En ce sens, beaucoup de travail reste à faire en vue de parfaire notre compréhension des enjeux relatifs à la GA, et ce, particulièrement dans les milieux de travail dits «traditionnels».
MODÉRATION
Xavier Parent-Rocheleau
Professeur adjoint, HEC Montréal
Xavier Parent-Rocheleau est professeur adjoint au département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal et membre de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. Il s’intéresse aux divers enjeux et répercussions de la transformation numérique pour les travailleurs et la gestion des ressources humaines. Ses travaux actuels portent spécifiquement sur la gestion algorithmique du personnel, la surveillance électronique, et la transparence entourant les usages de l’intelligence artificielle en GRH.
INTERVENTIONS
Antoine Bujold
Doctorant, HEC Montréal
Antoine Bujold est doctorant en comportement organisationnel et ressources humaines à HEC Montréal. S’intéressant au futur du travail, ses recherches portent sur les relations entre les technologies numériques et les comportements humains en milieux organisationnels ainsi que l’impact de ces technologies sur les pratiques de ressources humaines.
Michel Cossette
Professeur agrégé, HEC Montréal
Michel Cossette est professeur agrégé au département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal. Psychologue du travail de formation et conseiller en ressources humaines agréé, il mène des recherches sur la santé psychologique au travail depuis près de 20 ans. Plus spécifiquement, ses travaux portent d’une part sur les facteurs organisationnels et individuels impactant la performance au travail et la santé psychologique. D’autre part, ses activités de recherche et d’intervention concernent l’évaluation des programmes de gestion des ressources humaines, et plus spécifiquement comment les professionnels RH se positionnent stratégiquement à l’aide d’indicateurs de processus mais surtout de résultats RH.
Pamela Lirio
Professeure agrégée, Université de Montréal
Pamela Lirio, professeure agrégée, École de relations industrielles, et lauréate du Prix d’excellence en enseignement à l’Université de Montréal. Chercheuse associée au Centre de recherche interuniversitaire sur la mondialisation et le travail (CRIMT) et à l’OBVIA (axe industrie 4.0, travail et emploi), ses recherches portent sur la gestion internationale des ressources humaines, la transformation numérique en RH et l’intelligence artificielle (IA) responsable. Travaillant en anglais ainsi qu’en français, elle dirige la délégation canadienne de la Society for Human Resource Management (SHRM)—la plus grande association de professionnelles en RH au monde. Elle blogue fréquemment sur les plateformes de Twitter (@drpamelalirio) et Instagram (@shrmcanada) et a été nommée à la liste des influenceurs RH les plus inclusifs depuis 2020.
Benjamin Semujanga
Étudiant M.Sc., HEC Montréal
Benjamin Semujanga est étudiant à la maîtrise en gestion des ressources humaines à HEC Montréal. Ses intérêts portent sur les nouvelles formes de travail facilitées par la transformation numérique, notamment le travail de plateforme. Ses travaux actuels portent sur la rémunération algorithmique des travailleurs de la gig-economy et ses répercussions, ainsi que sur le rôle important de la transparence dans ces pratiques.
En complément
Résumé des présentations visuelles
«Au secours, mon employeur utilise la gestion algorithmique!», Les Affaires, 3 mai 2022